Dimma Dökkhönd était rarement inquiet, mais la visite récente de Zoé Moskau, espionne de son état, ne l'avait pas mis en confiance. Déjà qu'il se méfiait de la totalité des choses existantes, savoir qu'une espionne avait été envoyée spécialement pour lui ne faisait que renforcer sa paranoïa habituelle.
Zoé n'était que la première, d'autres viendraient forcément, tôt ou tard. C’était pour cette raison, notamment, que Dimma avait pris la décision d’accélérer ses plans. Néanmoins, il devait aussi se rendre à l’évidence que l’agitation récente des Gardiennes le contraignait peu à peu à quitter son repaire dans la forêt.
Dans les champs de ruines des plaines, Dimma était à la recherche de ce qu'on appelait communément une AEM : Arme d'Extermination Massive. La destruction, c'était surfait. L'extermination, c'était la vitesse supérieure. Les radars de son repaire avaient repéré exactement ce qu'il désirait : un Razoran. Un Razoran vivant, un vrai. Avec sa force brute pure et dure, Dimma était sûr de pouvoir faire pencher la balance en sa faveur. Cela ne devrait pas être difficile de le rallier à sa cause. Après tout, les Razorans étaient les créations des Elfes.
Dimma n'avait personnellement jamais été initié aux arts de la création des Razorans, et il semblait bien que ce secret s'était perdu à tout jamais dans les méandres des légendes et des contes. Ce n'était pas bien important, l'Elfe avait pris pour habitude de s'approprier le travail des autres.
Il traversait les ruines, à la recherche de son fabuleux trésor. Seul. Le Razoran était hostile à la quasi-totalité des races, en dehors des Elfes. Et encore, des Elfes qui savaient manipuler le métal, ce que par chance Dimma était. Il se posta sur une grosse pierre, les mains dans le dos, et contempla l'horizon. Quand même, un golem de deux mètres de haut au moins, cela ne pouvait pas passer inaperçu. Ou bien c'était un Razoran déguisé en mexicain.
Imparable. Un Razoran en poncho, doté d'une grande moustache et coiffé d'un sombrero, c'était inattendu. Dimma ne pourrait donc jamais l'apercevoir avec un déguisement aussi impeccable. Ces monstres étaient diablement intelligents, en fait...
Un souffle frôla Dimma. Ah ? Enfin ? Il se retourna, et remarqua qu'il s'agissait seulement de son fidèle Requiem.
— Qu'est-ce que tu fais là ? lui demanda Dimma.
Le SS au masque de carnaval pencha la tête sur le côté, aussi inexpressif qu'à son habitude.
— Je pouvais me débrouiller seul. Le Magicien n'a pas besoin de m'envoyer son sbire n°1 aux trousses constamment.
Requiem pencha la tête de l'autre côté.
— Comment ça, quelqu'un ? Une jeune fille ?
Dimma se prit le menton entre le pouce et l'index. Cette personne pouvait tout faire rater.
— Et je suppose que tu ne sais pas de quelle race elle est. Bien entendu.
Requiem dégaina un poignard.
— Bien sûr que tu vas la tuer. Elle va tout faire rater, autrement. Pour l'instant, cache-toi. Laisse-la venir jusqu'ici. Si j'ai besoin de ton aide, je te demanderai.