Un ovni parmi les prédateurs [PV Zorcha]

« On peut faire ça? »

Il alluma le téléphone et me le tendit. Une fois entre mes mains, je fouillai rapidement dans les contacts. Il y en avait beaucoup. Ce démon devait avoir pas mal d’amis, de connaissances ou d’associés. Il faudrait faire le tri, voir s’il n’y avait pas des sms révélateurs, des photos…

« Adromeda me protège, c'est comme ma mère adoptive. Je suis son second fils qu’elle a dit. »

Je relevai le « second ».

- Je crois bien que je connais le premier. Soufflais-je, tout bas.

J’étais pratiquement sûre qu’il s’agissait de la mère adoptive de Lev. Le monde était bien petit décidément !

« Je suis sur qu'elle est plus jeune que moi en plus. »

Je souris doucement devant son air contrarié. C’était compréhensible.

Il se rapprocha de moi se collant à mon épaule sans que ça ne me dérange vraiment. J’aimais le contact.

« Alors? Vous pouvez y voir quelque chose d'utile? C'est quoi ça? »

- Mmmhh oui, il semble avoir beaucoup de…

J’écarquillai les yeux devant la photo qu’il venait d’afficher.

- … connaissances...

Et visiblement plus que des connaissances !

Zorcha réagit immédiatement, horrifié :
« Ah! Ce n'est pas moi ça!!! »

Il tenta de faire partir l’image mais zooma à la place et je le vis paniquer encore plus.

« Je vous jure que je n'ai rien à voir avec cela!! »

Je ne pu me retenir d’éclater de rire. Un fou rire incontrôlable. C’était la seconde fois de la soirée que ça m’arrivait, je crois. C’était rare, mais vraiment bon. Je m’excusai auprès de mon compagnon entre deux souffles sans pouvoir m’arrêter. Il n’y était pour rien et la situation était plus que gênante pour lui, mais c’était tellement inattendu !

- On peut dire qu’il avait beaucoup de succès ! Et d’amis !

Et qu’il était sacrément bien foutu d’ailleurs ! Je crois bien que vu ses penchants, si j'avais rencontré ce démon et non Zorcha ce soir là, nous aurions sans doute fini dans le même lit ! Mais ça, je le gardais pour moi. Ce n’était pas le genre de choses qu’on disait à un ami, je crois.

Je fermai la photo gênante, bu une gorgée de mon verre pour me calmer et me tournai vers Zorcha, toujours joyeuse.

- Mais on a beaucoup de pistes là-dedans du coup, des pistes qui aiment visiblement les nuits torrides, et qui donc, ne seront pas difficiles à interroger.

Je bu de nouveau et le rassurai immédiatement :

- Je peux très facilement interroger des personnes sans leur donner la moindre parcelle de mon corps.

« J'aime mieux ça. Mais ce sera peut-être difficile quand même de trouver ces personnes. Depuis que je suis ici, personne ne m'a reconnu comme étant lui. Ils sont peut-être mort, ou loin dans une autre ville. »

Je fronçai les sourcils à cette remarque. Combien de ces personnes ont survécu ? En restait-il au moins une seule ici ? Peu importe, j’étais motivée et Zorcha aussi. A nous deux on pouvait bien retrouver ce démon !

Il fit apparaitre une nouvelle photo et je sentis les résidus de mon hilarité partir d’un seul coup.

J’observai minutieusement l’image, impressionnée par la taille du dragon. Je n’en avais jamais vraiment vu en vrai et je comprenais mieux pourquoi Zorcha se pensait minuscule maintenant. Il ne fallait pas être particulièrement intelligent pour comprendre qui était qui et quand cela avait été pris. Comment pouvait-on songer à prendre une photo dans un moment pareil, en plein milieu d’une guerre ? Quel type de personne était ce démon pour immortaliser ce genre de scène comme s’il s’agissait d’un trophée ?

Je n’étais pas très fan des photos, j’avais plutôt tendance à effacer les traces derrière moi, ce qui n’aidait pas à ma compréhension de ce geste.

Zorcha zooma. Il apprenait vite apparemment.

« C'est lui? »Demanda-t-il en désignant le sorcier sur la photo.

J’acquiesçai silencieusement.

Il avait l’air tellement triste ! Je voulais dire ou faire quelque chose pour lui changer les idées, mais je n’étais pas encore assez douée pour ce genre de situation.

Finalement, ce fut lui qui changea de sujet.

« Alors vous connaissez le fils d'Andromeda? »

Je ne pus m’empêcher de sourire un peu bêtement.

- Nous nous fréquentons très régulièrement.

« J'espère que vous ne faites rien de mal à ce garçon, la colère de sa mère pourrait être terrible. »

Rougissant, je le rassurai immédiatement :

- Oulà, non, il n’y a rien entre nous ! C’est jute un ami. Je marquai un temps de pause et souris de nouveau. Mon premier ami.

C’est vrai qu’on pouvait penser, vu mes tendances, que je couchais avec Lev, mais c’était bien le seul homme avec qui je partageais le lit sans pour autant faire quoi que ce soit de sexuel.

Je terminai mon verre et le posai sur la petite table à côté de nous.

- Il m’a sauvé la vie et m’héberge très souvent depuis. Je me repris. J’ai une maison, évidemment, mais je n’aime pas être seule et il est vraiment gentil.

Tout en disant cela, j’avais inconsciemment adopté un air un peu rêveur. Lev était véritablement adorable et attentionné. Qui aurait envie de lui faire du mal ?

- Cette dragonne n’a aucune raison de se mettre en colère. Son fils est un des rares hommes auquel je ne ferais aucun mal.

Je tournai la tête vers Zorcha.

- Et à vous aussi évidemment.

Je souriais, reléguant le souvenir de la photo bien loin dans ma mémoire. Je trouvais tout de même surprenant qu'un homme hébergeant pareille beauté n'ai rien fait avec celle-ci. Connaissant les mœurs de la gente masculine de la civilisation edorienne.

« Je n'ai pas eu la chance de rencontrer ce garçon encore. »

Mais je savais bien peu de chose sur ce fils. Et il se pouvait qu'il soit peu porté sur la chose tout comme moi. Ou qu'il ai ses raisons pour n'avoir rien fait. Tous les hommes n'étaient pas des salauds. Et puis avec Andromeda comme mère adoptive, il avait certainement plus de raison de bien se tenir. Je laissais filer un petit rire à sa remarque.

« Il y a longtemps que le charme n'a plus d'effet sur moi, mon coeur est déjà prit. Il faudrait plus que ce genre de manipulation pour me faire du mal. »

Je baissais les yeux en pensent à ceux qui détenaient mon coeur. Des êtres chers que j'avais perdus, mais que je n'oublierais jamais. Au même instant le rideau de notre isoloir s'ouvrit brusquement sur une silhouette qui n'était pas inconnu, la suite me laissa confus. Un instant j'étais contre Symphonie, l'instant suivant après avoir sursauté de cette intrusion, je me retrouvais en plein milieu de la piste de danse. Les yeux grands ouverts, je regardais les gens autour, tout aussi confus de ma soudaine apparition et qui peu à peu la surprise se transformait en frayeur. Je venais de comprendre... Le don du démon que je n'avais encore jamais réussi à utiliser venait de se déclencher sous la surprise, et probablement aidé par l'alcool. Je m'étais téléporté.

« Un démon!»

J'étais... Dans la merde... Mes cornes et ma queue à découvert dénonçaient ce que j'étais. Je voulu me téléporter de nouveau, mais en vain. Je couru, me frayant passage au travers des gens avec maladresse, ma stabilité affecté par ma consommation. Ralentis par ceux qui voulait déployer leur haine des démons. Je retrouvais l'alcôve pour y découvrir l'homme que Symphonie avait séduite à mon arrivé et qui nous avait apporté à boire. Il voulait visiblement ce qu'elle lui avait promis lui donner plus tard. Impatient de satisfaire ses bas instincts, abrutis par l'alcool.

Je le poussais avant qu'il ne fasse de mal à mon amie. Et j'attrapais mon téléphone resté dans les mains de la dame. J'entendais la panique dans le bar, du à ma présence. Il était temps de faire ma révérence et d'abaisser les rideaux! Je fis une petite courbette face à Symphonie.

« Navré de partir si vite damoiselle Symphonie! On se téléphone! »

Je récupérais mon chapeau pour le remettre rapidement sur ma tête en me retournant, me retrouvant face à l'homme saoul qui semblait bien entêté à avoir Symphonie. Je lui attrapais les mains en but de le repousser de nouveau, et elles devinrent instantanément glacées! Ma surprise laissa place à un sourire ravis de cette découverte. Mais je n'avais pas le temps de festoyer sur ce pouvoir que je me découvrais. Je lançais un dernier regard à ma compagne, voulant lui transmettre cette joie, lui dire : regarde! De la glace! J'ai toujours mon pouvoir!

Je me retournais, évitant un poing de justesse d'un inconnu, le glaçon à côté criant en fixant ses mains gelées. Et je pris mes jambes à mon cou. Évitant de justesse les attaques, je sortais du bar pour m'en éloigner le plus loin possible. Fébrile de ma découverte, je ne songeais pas au danger que la rumeur d'un démon en ville se propage.

Je ne pus m’empêcher de sourire tendrement lorsqu’il laissa entendre qu’il avait déjà quelqu’un dans sa vie. C’était mignon. Et triste, vu sa situation actuelle.

J’allais répondre quand tout se déroula très vite, les rideaux s’ouvrirent et Zorcha disparu.

Je restai quelques secondes à fixer l’endroit où il s’était trouvé, mon cerveau traînant pour trouver une explication logique, puis reportai mon attention sur la personne qui nous avait dérangés et…


Oh….



… Ah…



J’étais mal barrée.



Vraiment mal barrée…



L’homme qui nous avait « généreusement » offert nos première consommations avait continué à boire et m’avait retrouvée on ne sait comment. Surement une bestiole avec du flair.


Je détestais cette capacité !


Et je détestais encore plus les hommes, déjà bien lourds à la base, alcoolisés. C’était les plus dangereux.


Je le fixai, les yeux écarquillés, cherchant mentalement une issue de secours.

S’il avait le flair, il devait avoir la vitesse et/ou la force qui allait avec. Je n’avais que très peu de capacités surhumaines, voire aucune en dehors de l’eau. Ah si, j’avais un radar. C’était pratique, un RADAR ! Non mais comme si un truc comme ça pouvait m’empêcher de me retrouver dans une situation comme maintenant !

Finalement Zorcha arriva derrière l’homme et le poussa à temps. Je me levai prestement tandis qu’il récupéra son téléphone et son bonnet.

C’était le bon moment pour se faire discrètement la malle.

Mon nouvel ami semblait penser la même chose puisqu’il fit une légère courbette, m’arrachant un sourire, et me salua.

« Navré de partir si vite damoiselle Symphonie! On se téléphone! »

Je ne pus m’empêcher de le saluer en baissant la tête et légèrement le buste. Ses manières étaient visiblement contagieuses, et bien agréables. Surtout quand on les comparait au pervers ivre qui revenait à la charge.

Zorcha lui attrapa les mains et… Les gela.

J’écarquillai les yeux et me figeai en voyant le phénomène se produire et mon sourire s’élargit en voyant le sien. Visiblement, sa condition de démon allait être plus agréable avec ce pouvoir familier !

Je ne restai pas pour assister à la suite, profitant de la panique ambiante pour me faufiler vers la sortie, me frottant aux inconnus au passage, mêlant nos odeurs au cas où l’homme tenterait de me suivre.

Une fois sortie, je retirai mes chaussures, sans vraiment prêter attention aux alentours et couru le plus vite possible vers le port.

Trouver un amant était un peu trop risqué ce soir et cette conversation m’avait quelque peu retournée, je n'avais vraiment pas la tête à batifoler. Je pouvais rentrer chez Lev, évidemment, mais il était trop tard et je n’avais pas envie de lui envoyer un pisteur passablement alcoolisé et totalement excité au beau milieu de la nuit.

Une fois au bord de l’eau, je cachai mon téléphone à l’endroit habituel, retirai mes vêtements et hésitai à les cacher également… Non, ils avaient mon odeur, il valait mieux les mouiller aussi. Je n’avais pas passé de nuit sous l’eau depuis des années, mais finalement c’était la meilleure option possible.